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18 juin 2012

Ivraie

                                                        Ivraie

 On en parle souvent mais on ne sait pas vraiment à quoi elle peut bien ressembler. Forcément, puisqu’on ne pense qu’à trier le bon grain pour la virer. Pourtant ce serait utile de bien connaître la plaie des jardiniers. L’ivraie vous pollue un carré de carottes ou vous étouffe une raie de haricots en un rien de temps de cultivateur négligent. Sachez donc que cette espèce produit des grains semblables à ceux du blé et que son nom vient de l’euphorie que peut provoquer sa consommation.           

         Je sais ce que vous vous dites : quel est ce raseur avec son histoire de carottes et d’herbes folles. Il nous court sur le haricot. Pas du tout. Même si vous habitez une grande ville comme la majorité des contemporains je suis sûr que vous continuez à vous gargariser d’expressions désuètes et de mots dont l’usage a disparu. Séparer le bon grain de l’ivraie relève aujourd’hui davantage de la philosophie du jardin de Panglosse que de l’opération domestique.

         Ainsi, des élections récentes nous ont montré l’intention d’une partie des citoyens de séparer les bons de leur village des autres venus d’ailleurs. Cette aspiration est d’autant plus drôle qu’elle émane en majorité de zones dans lesquelles les néo-ruraux remplacent les paysans disparus et où les immigrés ont peu accès. Quand l’ivraie pousse davantage dans les têtes que sur les fossés la situation devient piquante comme une ortie.

         La question de l’ivraie est plus compliquée qu’il n’y paraît. Bonne ou mauvaise, il n’est pas si facile de trancher. Pensez. C’est l’herbe folle qui emplit les fossés après les pluies ; c’est l’avoine aux longues cloches qui frémit en houle sous la brise ; C’est le trèfle porte bonheur qui envahit tout ; c’est le chardon, le bleuet, le coquelicot, le sainfoin qui pousse sauvage avec le serpolet.

         Tiens ! C’est dans ces herbes que les adolescents aiment jouer, se poursuivre et rouler ensemble pour se toucher à l’abri des regards. On se demanderait même si le trèfle ne garderait pas, année après année, la mémoire des virginités perdues sur sa couche moelleuse lorsqu’il vient au printemps. Messieurs les néo-ruraux bleu marine sachez donc qu’il y a de la bonne ivresse dans l’ivraie et que le blé en herbe de Colette avait toutes les chances d’être plutôt un champ des graminées d’amours sauvages.

         La diversité a du bon dès lors qu’elle enrichit nos paysages sans les étouffer. Je connais même quelques jardiniers amoureux qui laissent pousser un carré d’herbes folles au milieu de leurs allées.

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  • Blog des mots. A partir d'une définition de mots simple, ce blog raconte l'actualité, effleure les sentiments, égratigne les gens et les hommes publics tout en s'efforçant de distraire. Gardons le sourire, les temps sont durs.
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