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7 mars 2013

Arcane

                                                                           Arcane

             Un secret bien gardé, voilà ce qu’ils prétendent recéler, en tout cas les arcanes du pouvoir, de l’industrie, du savoir faire bien de chez nous, des expéditions militaires, parfois des histoires de famille rocambolesques ou cruelles, inavouables ou même répréhensibles; allez donc savoir combien de noirs desseins ont caché les arcanes ou, à l’inverse, des projets fastueux qu’il convient de protéger afin de cheminer avec eux pas à pas, par des voies compliquées, afin qu’ils aboutissent un jour, lointain peut-être.

             Rome qui fut à l’origine de ces mystères nous l’enseigna encore hier avec la renonciation imprévue d’un pape. Les arcanes du Vatican ont alors paru bien obscurs aux adeptes pétris de foi qui aspirent à la lumière divine lorsque le premier de ses serviteurs a fait part de sa lassitude, tout en laissant le soin à chacun d’en deviner les causes. Las, parmi les commentateurs tous ne sont pas fidèles, et de loin. Certains se dépêchèrent de sonder les caves de la Cité pour imaginer de sombres spéculations de sa banque, d’autres évoquèrent les luttes internes pour occuper les postes et prébendes, les clans, les coteries cherchant à assurer leur place et leur avenir comme aux plus beaux jours des Borgia, avec la différence hallucinante de l’histoire écoulée. En ce temps là Rome était le Monde, tandis que de nos jours c’est le monde qui regarde Rome et sa minuscule Cité, arpentée de cardinaux et d’archevêques avides du moindre rôle dans le spectacle universel retransmis en direct sur les lucarnes des cinq continents. Pour comble les plus indécents répandirent la rumeur de l’éventualité d’une insurmontable perversion des mœurs de quelques uns. Voilà pour la lassitude d’un pape.

             Comme un fleuve qui suit des méandres compliqués ou se disperse, diffuse ses eaux au hasard des multiples bras d’un immense delta, les arcanes de la pensée pourraient être les témoins véritables de la personnalité des individus. Aujourd’hui controversé, parfois accusé, Freud parmi les papes en fut un autre. D’une autre sorte bien entendu, il ne se penchait que  pour interpréter la pensée sans même prétendre à la régir. Il nous décrivit jusqu’au plus loin de la mémoire cachée tels qu’en nous-mêmes, depuis les pulsions primitives enracinées aux origines jusqu’au traumatisme de notre naissance et à l’accumulation inconsciente de nos frustrations dans des zones et des couches latéritiques de notre cerveau. Bien qu’il fît beaucoup de bien aux  femmes de Vienne puis du monde entier voilà que, comme pour un pape ses disciples se divisèrent en chapelles, ses épigones en sous ordres, publièrent libelles et pamphlets et s’excommunièrent  comme aux plus beaux jours de la Réforme. Il faut bien admettre avec Lacan que si «l’inconscient est structuré comme un langage», l’interprétation qu’on en donne est difficile à vérifier et devrait être réservée au libre usage des individus. N’empêche, prétendre avec M Onfray que Freud doit tout à Charcot et qu’on aurait pu en rester à la neurologie me semble un peu restrictif pour la bonne pratique de l’interprétation des rêves. Et si le rêve fait l’homme.

             La liberté n’est sans doute plus à la mode en ces temps d’incertitude mais je reste persuadé que Freud a beaucoup contribué à la réhabilitation de la sincérité des relations entre hommes et femmes, voire autrement sexuelles, à lever la chape de plomb de la morale victorienne en vogue en Europe, à établir la liberté d’être et de pensée comme valeurs inaliénables, toute une évolution couronnée par l’explosion des idées de 1968, excusez du peu. Quand même, si on sait bien aujourd’hui que sous les pavés il n’y a pas la plage il n’est plus interdit de la chercher et de détenir ou partager son plaisir en secret, c’est selon.

            Les arcanes seraient finalement dangereux, voilà ce que nous suggèrent les âmes bien nées qui se gardent les haut du pavé pour elles seules et aspirent à contenir les autres dans les ressorts modestes de la contrition. Celà ne nous sied guère : Il advient qu’on rend hommage aujourd’hui à un illustre survivant de toute cette histoire ce qui montre bien qu’il sera impossible de revenir en arrière.  Indignons nous !

 

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